Le geste émotionnel dans l’art construit
Cette année, la galerie Bessières propose à Art Paris Art Fair un stand qui fait la part belle à une approche qui joue du paradoxe entre la dimension formelle et une relation plus émotionnelle, plus habitée. Le visiteur est accueilli dans un espace parfaitement lisible, épuré, par trois artistes héritiers de l’abstraction géométrique. Alain Lambilliotte, laisse la part belle au regardeur qui recompose le motif, et qui, par sa présence, inverse la composition initiale ; Serge Najjar montre dans ses prises de vue, des architectures en lien avec Malevitch, les constructivistes et les formes pures ; mais c’est bien l’être humain entraperçu qui permet d’incarner ces habitations ; Jane Harris quant à elle, continue à explorer en peinture la figure ambivalente de l’ellipse, proposant plusieurs points focaux et laissant notre propre regard recomposer les œuvres à l’infini. Cette première pièce « minimaliste » permet donc une lecture à deux temps, suscitée par la position du regardeur qui s’approprie les formes. Derrière la semi cloison, apparaît au contraire en contrepoint, comme en miroir, le foisonnement baroque des dessins d’architecture fantastique d’Octave Marsal qui propose le chemin inverse, passant de l’émotion première à une réflexion sur la « grandeur » monumentale et ses conséquences formelles.
Alain Lambilliotte, né en 1949, vit et travaille en France, poursuit une œuvre d’ampleur, classée dans une forme de déconstructivisme chère à Support-Surface, mais dépassant en réalité toutes les catégories habituelles de l’art. Il a exposé dans de nombreux centres d’art et est présent dans les collections du Musée National d’Art Moderne et du Musée d’art moderne de la ville de Paris.
Jane Harris, née en 1956 au Royaume Uni, vit et travaille en France, a présenté son travail dans de nombreuses institutions internationales. A la manière des minimalistes et des conceptuels, elle poursuit inlassablement son exploration autour d’une seule figure, l’ellipse, comme élément central de disruption de la perspective.
Octave Marsal, né en 1990, vit et travaille en France, diplômé de deux écoles d’art à Londres, est un dessinateur prometteur dont la technique irréprochable n’empêche pas l’exploration de nombreux mediums tels l’installation ou la vidéo d’animation. Il interroge notamment les dessins d’architecture contemporaine, souvent utopistes, à travers des univers fantastiques à la Bosch ou à la Brueghel. Son parcours compte déjà de nombreuses participations et prix.
Serge Najjar est né à Beyrouth, Liban en 1973. Photographe libanais, il est Docteur en Droit, Diplômé de l’Université Panthéon-Assas à Paris. Il est photographe autodidacte. Il vit entre Paris et Beyrouth. L’ œil photographique de l'artiste se focalise sur le rapport aux matières et à toute l’histoire de l’art moderne et de l’abstraction géométrique. Car pour instinctif qu’il soit, son regard nous permet de revisiter notre monde contemporain à l’échelle des hommes qui apparaissent et humanisent les architectures utopiques ou écrasantes. Aussi ses images interrogent-elles les relations entre peinture et photographie.